RP : Planification, veille, publics et astroturfing

Deuxième sujet de la session hiver 2016 avec mes étudiants du CRM 801 à l’UdeS, nous abordons des aspects liés à la planification stratégique en relations publiques. Notre attention dans cet échange porte sur la gestion des enjeux de communication, l’intégration de la vigie tout au long des phases d’un processus d’intervention en relations publiques (voir figure ci-bas) allant du diagnostic à la mesure des effets. Si la planification stratégique des relations publiques doit s’appuyer sur une vigilance, elle doit prendre en compte dans certains cas du phénomène de l’astroturfing. «Dans son application au monde des communications, l’expression est utilisée en référence à des pratiques qui s’opposent à des mouvements dits de « grassroots », c’est-à-dire des initiatives citoyennes, ou qui les imitent.» Boulay (2015)[1]

 La veille stratégique

Comme nous le mentionnons dans le vocabulaire des relations publiques , en termes de relations publiques, la veille stratégique consiste à procéder systématiquement, avant d’élaborer et de mettre en oeuvre une stratégie de relations publiques, à une recherche pointue et une analyse rigoureuse des informations qui permettent d’anticiper les enjeux et les tendances, d’identifier les facteurs influents, de déterminer les problématiques/enjeux de communication potentiels, de proposer les stratégies et moyens adéquats pour y faire face. Dans cette optique, la veille stratégique demeure un élément essentiel de la gestion d’enjeux et une multitude d’outils de vigie sont d’une aide précieuse dans la structure de l’écoute d’une organisation. Nous avons eu l’occasion d’en découvrir les possibilités avec deux experts en vigie lors de nos deux derniers cours.

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 La gestion des enjeux de relations publiques

Quant à la gestion des enjeux, c’est un processus systémique et stratégique de recherche et d’analyse permettant à la fois d’anticiper des changements, des tendances, des problèmes ou des questions de tous ordres, d’en alerter l’organisation sur leurs conséquences éventuelles (positives ou négatives) sur son image ou sa réputation dans le but d’agir. Les organisations qui font de la gestion des enjeux une priorité sont généralement mieux préparées à affronter les vicissitudes de leur contexte et de leur environnement particuliers, voire d’une crise éventuelle.

Les incontournables publics

Bien entendu, la planification stratégique en relations publiques doit prendre en compte les publics. Alors qu’en publicité, on parle de la cible comme étant le groupe visé, ou si l’on veut, le segment de la population totale des consommateurs qu’une campagne de publicité ou un plan média doit toucher. Ce segment de la population est identifié en fonction de caractéristiques sociodémographiques ou psychosociologiques homogènes.

Les relations publiques s’appuient sur une notion différente, celle des « publics ». Un public est un groupe plus ou moins structuré qui peut influer sur le cours des activités d’une organisation selon qu’il adhère ou résiste aux visées de l’organisation.

Les publics d’une organisation sont des acteurs sociaux qui exercent une influence ou un pouvoir qui peut avoir des conséquences importantes sur la réputation et la bonne marche des activités d’une organisation. Ils constituent habituellement des regroupements organisés, mais peuvent aussi être des individus qui sont regroupés plus informellement par un intérêt commun de nature sociale, communautaire, économique ou culturelle.

Phénomène récent: l’astroturfing

Comme l’indique Sophie Boulay dans un article scientifique sur l’astroturfing de la revue communication, « l’astroturfing est une stratégie de communication dont la source réelle est occultée et prétend à tort être d’origine citoyenne. » Un des éléments saisissants de son article, le Web contribue fortement à ce phénomène. Doit-on en tenir compte dans le processus de planification des relations publiques ? Une question conduisant à de multiples réflexions.

Question pour mes étudiants du CRM 801 H 2016

Nous avançons vers la réalisation du TP 1 de la session consistant en une étude de réflexion comportant une analyse de l’environnement d’une organisation, de cerner la problématique et les enjeux, d’identifier les publics cibles, etc. Choisir, commenter et fournir vos références sur un des aspects suivants: la planification ou la veille stratégique, la gestion des enjeux, les publics d’une organisation ou encore de l’astroturfing afin que les collègues de notre groupe cours disposent d’un éventail d’angles d’analyse pour la réalisation et la présentation du TP 1. Au plaisir de vous lire.

[1] Boulay, S. (2015) Usurpation de l’identité citoyenne dans l’espace public, Astroturfing, communication et démocratie, PUQ.

Regard sur les prémisses du modèle social des relations publiques

Comme à chaque session, dans le présent blogue, j’échange avec mes étudiants sur des contenus de nos cours et nos échanges sont ouverts au lecteur citoyen présent sur l’Internet. Mes étudiants sont invités à commenter un sujet que je leur propose et de prêter leur regard critique à un dialogue ouvert sur le domaine des relations publiques. Comme premier sujet, nous échangerons avec Matthieu Sauvé, auteur d’un ouvrage publié en 2010 et intitulé Les relations publiques autrement -Vers un nouveau modèle de pratique (2010).

Comme l’indique Matthieu Sauvé, le rythme de la production de la connaissance des relations publiques et la profusion d’outils de diffusion dont les médias sociaux sont des phénomènes marquants dans l’évolution du secteur des relations publiques. Dans le cours CRM 801 à l’UdeS à la session hiver 2016, nous avons amorcé nos travaux avec certaines approches théoriques proposées par M. Sauvé pour analyser la conception des relations publiques modernes et des concepts clés qui méritent une attention pour la pratique des relations publiques ou une organisation soucieuse de la qualité et de la gestion de ses relations avec ses différents publics. Ces éléments sont détaillés dans les chapitres deux et trois de l’ouvrage de Sauvé (2010) desquels, nous pouvons retenir plusieurs éléments clés comme cadre d’analyse des études de cas à venir dans nos prochains cours du CRM 801.

Si le domaine des relations publiques a franchi plusieurs étapes depuis le début du 20e siècle allant d’une approche initiale unidirectionnelle, au 21e siècle, la communication bidirectionnelle est omniprésente dans les organisations communicantes. Même si la communication unidirectionnelle est primée selon les contextes de communication comme dans les campagnes d’information-promotion ou lors de campagnes de communication contre le tabagisme, depuis quelques années, la communication bidirectionnelle est priorisée tant dans les relations publiques tout comme les relations publiques marketing et dans l’ensemble de l’industrie des communications.

Pour mes étudiants du CRM 801

Nous avons vu les principaux éléments constitutifs du concept de relations publiques dans les modèles managérial et social dont la nature des relations publiques est différente (figure 4.1 p. 75 Sauvé, 2010). Dans le modèle managérial, les relations publiques sont une fonction de gestion de l’organisation et dans le modèle social, les relations publiques sont une fonction de communication au service de l’ensemble des parties prenantes. Certains projets comme les oléoducs, les lignes de transport d’électricité, les infrastructures, etc, gagnent à considérer les relations publiques avec le modèle social compte tenu de l’importance des nombreuses parties prenantes.

Question

En vous référant à Sauvé 2010 et particulièrement de la figue 4.2 de la page 79 au sujet de la mise en présence des parties prenantes, parmi les prémisses proposées par l’auteur dans le chapitre 4, nommer puis commenter deux prémisses qui selon vous, devraient être priorisées au sujet projet Énergie Est qui retient l’attention depuis plusieurs mois ?

Le projet Oléoduc Énergie Est de la compagnie TransCanada consiste à construire un nouvel oléoduc qui transportera environ 1,1 million de barils de pétrole brut par jour, de l’Alberta et de la Saskatchewan, vers des raffineries situées au Québec et au Nouveau¬-Brunswick.

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Communication de crise et médias socionumériques

Une crise est un risque qui se manifeste 

Dans les derniers cours du CRM 801 Pratiques avancées en relations publiques à l’Université de Sherbrooke, nous avons vu différentes implications des médias traditionnels et des médias socionumériques dans la gestion de crise d’une organisation. D’après PR Strategy and application Managing Influence Combs et Halladay (2010), les médias définissent en partie les crises ce qui influence l’étude de la préparation et de la réponse de celles-ci en tenant compte de la couverture médiatique, mais aussi de la qualité des relations d’une organisation avec ses publics. Même si la prévention des crises peut être considérée comme une façon d’éviter une couverture médiatique négative, une crise peut générer une modification importante de la planification stratégique des communications d’une organisation.

Dans l’excellente référence en communication de crise The handbook of crisis communication de Combs et Halladay 2012, toute prévention de crise s’amorce par une planification stratégique des enjeux et des risques de  l’organisation incluant la communication, ce qui signifie que l’intégrité d’une organisation devient au centre de toute crise. En clair, une crise est un risque qui se manifeste! C’est pourquoi, le travail en amont, à l’étape de la gestion des risques voire de la mise à l’agenda dans certains cas de gestion de réputation permet d’anticiper les scénarios potentiels des risques, la façon de la gérer et de communiquer en fonction du contexte d’une éventuelle crise.

 Investir dans les médias socionumériques

Depuis quelques années déjà, les usages récents des médias socionumériques offrent plusieurs exemples permettant d’étudier le rôle incontournable des plateformes socionumériques en situation de crise. Bien entendu, les médias traditionnels demeurent toujours des incontournables et ils agissent souvent comme des amplificateurs d’information en situation de crise. Cependant le fait que les médias de masse soient sélectifs des nouvelles qu’ils diffusent pour répondre aux attentes de leurs auditoires ou lectorat, ils utilisent les plateformes socionumériques comme source d’information en situation de crise en tenant compte de l’importance de l’événement et de la proximité de leurs auditoires. Pour les individus vivant une crise, il en va autrement, ils doivent en plus de disposer d’information pertinente, prendre des décisions de différents niveaux d’importance jusqu’à un retour à une situation normale. C’est de ce principe que les organisations gagnent à s’investir dans les médias socionumériques pour accompagner leurs publics à toutes les étapes d’une crise.

Signes avant-coureurs = proaction

Les médias socionumériques sont devenus incontournables dans la planification des communications de crise  des organisations. Les événements pour en tirer des leçons sont malheureusement nombreux et suffisamment documentés pour en étudier les processus de communication dans le but d’optimiser un plan de gestion de crise : l’ouragan Sandy en 2012 pendant laquelle la FEMA a joué un rôle clé dans la gestion des communications, le séisme à Haïti en 2010 qui a fait ressortir la rapidité des médias socionumériques davantage que les médias traditionnels pour alerter et mobiliser les ressources clés pour gérer le sinistre. Plus près de nous, au Québec, le terrible accident ferroviaire de Lac-Mégantic en juillet 2013 d’où il semble évident que les signes avant-coureurs d’accident n’ont pas été communiqués proactivement ce qui aurait permis d’alerter plus tôt la population de ce danger. Guylaine Maltais et Cedric Moro ont d’ailleurs publié une analyse initiale de l’utilisation des MSGU quelques jours suivant la catastrophe de Lac-Mégantic. En somme, l’utilisation des médias socionumériques est devenue un incontournable pour la gestion de crise. Encore ces jours-ci, on a peine à imaginer les effets au passage du typhon Haiyan qui a balayé les Philippines dans la fin de semaine du 8 novembre 2013 et fait plus de 10 000 victimes. D’ailleurs au moment d’écrire ce blogue, le typhon se dirigeait vers le Viêtnam où des centaines de milliers de personnes ont été évacuées vers des sites éloignés des zones dangereuses. Les organismes d’aide pour ne nommer que ceux-ci utilisent abondamment les médias socionumériques pour maximiser leurs opérations d’aide aux sinistrés en Asie.

Viser une communication dialogique

Cependant, si les médias socionumériques jouent un rôle clé d’alerte et d’interactions entre les individus impliqués dans une crise, il demeure une chose évidente, il est essentiel que les organisations systématisent leur présence dans ces plateformes puisqu’elles ont la capacité non seulement d’informer, mais aussi d’envisager dans la mesure du possible une communication dialogique entre l’organisation et ses publics. Par conséquent, les organisations doivent s’intéresser à cette approche bidirectionnelle symétrique en situation normale de leurs opérations et non pendant une crise.

Niveaux d’engagement

Planifaction et Goudreau Communication deux firmes spécialisées en communication d’urgence au Québec, mettent de l’avant, avec raison, l’importance d’intégrer les médias socionumériques dans les mesures d’urgence des organisations. Un point marquant des ateliers offerts par (Guylaine Maltais et Judith Goudreau) repose entre autres, sur la sensibilisation que les organisations devraient accorder à la crédibilité et à la confiance que leur accorderont leurs publics. Cela se joue par la qualité de leur présence et de leur niveau d’engagement dans les médias socionumériques. Les trois niveaux à considérer :

  1. Passif : pour observer et obtenir de l’information
  2. Actif : pour répondre aux inexactitudes et aux questions
  3. Engagé : passif et actif et prise en charge des diverses plateformes socionumériques

Question pour mes étudiants du CRM 801 

En tenant compte des attentes croissantes impliquant les médias socionumériques dans la gestion des crises et en vous référant aux chapitres 11 Risk Communication et 12 Crisis Communication de Combs et Halladay (2010 quels éléments vous apparaissent essentiels pour qu’une organisation effectue un véritable virage afin de favoriser une communication dialogique impliquant des plateformes ou médias socionumériques en situation de crise.

Utiliser un exemple au besoin et ajouter toute référence en ligne que vous jugez crédible pour permettre à notre groupe cours de disposer de sources sérieuses pour leurs travaux académiques ou professionnels.

La mise à l’agenda des enjeux

La mise à l’agenda des enjeux

 

Le thème du cours du 2 octobre 2013  porte sur la gestion des enjeux. Les auteurs du livre de référence du cours CRM 801 , Coombs, W. E.T. Holladay (2010) PR Strategy and Application Managing Influence mentionnent que la gestion des enjeux est une activité importante des relations publiques puisqu’elle requiert une approche finement planifiée de l’interaction entre l’organisation et ses publics. Outre pour bien cerner les éléments liés aux imputabilités des organisations par rapport aux enjeux dans l’exploitation de leurs affaires courantes, les auteurs mentionnent que la gestion des enjeux offre un cadre et des balises pour analyser les activités de groupes activistes. Pourquoi ? Parce que l’emphase sur le changement est dominante dans l’activisme tout comme dans la gestion des enjeux ! Commbs 2010 p. 93 affirme «Clearly, activists are practicing public relations and often in a very complex manner.» Ce qui amène les  auteurs à cette observation relève de l’effet recherché pour influencer les politiques publiques en démocratie. «The concern over public policy looses resulted in the creation of issues management, a systematic and often more proactive approach to addressing public policy concerns.» Commbs 2010 p p. 187

 

Il est intéressant de considérer les enjeux comme des problèmes suffisamment élaborés nécessitant une solution. Un enjeu mal géré peut devenir une crise. L’approche classique en gestion d’enjeux comprend quatre étapes :

 

  1. la mise à l’agenda (augmenter le degré d’attention d’un enjeu à un niveau élevé voire médiatique ou des dirigeants d’une organisation)
  2. la formation d’une politique
  3. la mise en œuvre de la politique
  4. l’évaluation de la politique

 Trois agendas en interaction

 

Dans le chapitre 10, Coommbs stipule que la mise à l’agenda commence par le media agenda bref d’influencer la couverture médiatique c’est-à-dire que l’enjeu soit sélectionné par les médias ( on fait référence ici aux médias conventionnels de masse) puisque le media agenda influence le public agenda c’est-à-dire les enjeux qu’une population considère importants. Ensuite, l’attention se porte sur le policy agenda donc les influenceurs des politiques publiques, les élus et les mandarins d’un état. En somme, ces trois agendas interagissent entre eux et ils sont influencés par des facteurs externes. Tout compte fait, chaque groupe d’intérêt tente de mettre en valeur les enjeux de son agenda !

 

La gestion d’enjeux signifie la collecte d’information au sujet des préoccupations des acteurs actifs pour comprendre et documenter le manque d’adéquation par exemple de projets, concepts, produits, services, etc. d’une organisation ou encore d’une cause sociale émergente dans le but de dégager un équilibre acceptable pour les différentes parties prenantes. En bref, ces informations sur les enjeux procurent des intrants pour permettre une adaptation aux changements attendus. Coombs mentionne que la gestion des enjeux ne concerne pas uniquement une adaptation au contexte d’une politique publique, mais aussi d’entraîner une organisation à s’adapter aux changements dans la société.

 Trois stratégies : un choix délicat

Un enjeu se développe lors d’une divergence entre les comportements d’une organisation et les comportements attendus par ses parties prenantes (Heath in Commbs, 2010 p. 191 ). Cette friction peut nuire à l’harmonie recherchée des interrelations d’une organisation avec ses publics d’où l’importance d’identifier les enjeux de communication en relations publiques. Cette évaluation permettra de concevoir les options de stratégies d’action de l’organisation à savoir si elles doivent être réactives, adaptatives ou dynamiques. (p. 193). La stratégie réactive implique de se préparer aux effets d’un enjeu, la stratégie adaptative de proposer une voie alternative aux actions soulevées et la stratégie dynamique, la plus proactive consiste à anticiper les enjeux et de proposer des solutions tenant compte des intérêts de toutes les parties.

 Question à mes étudiants

De ces trois stratégies, laquelle vous apparaît préférable et pourquoi dans le monde d’aujourd’hui considérant qu’en plus des médias conventionnels s’ajoute les médias sociaux pour influencer les politiques publiques ? Quelle recommandation en terme d’actions mesurables en relations publiques feriez-vous à un client qui doit intervenir comme porte-parole dans un débat public pour faire valoir le point de vue de son organisation au sujet d’un enjeu controversé par les publics de l’organisation?

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